Que dire de ce film? Et bien l'âne est partagé, mi-figue mi-raisin, il adore cette expression d'autant plus qu'il commence à avoir faim. Commençons par le négatif, certaines critiques trouvent le film plat, aseptisé et on peut pas leur donner tout à fait tort je pense. Grosso modo, le but du film est de montrer la cruauté d'un milieu au dehors pourtant resplendissant, ceci à travers le regard honnête et un peu ingénu d'une jeune fille apprentie geisha. La colombe au milieu des corbeaux (WS) est censée par contraste faire rejaillir la méchanceté ambiante puis la nuancer à travers son pardon et la complicité qu'elle entretient avec certains personnages de la maisonnée. Ben je dois dire, que je ne suis pas franchement convaincu, je pense qu'un problème se situe au niveau du scénario et d'une partie de la réalisation, non pas du côté de l'actrice, en effet je trouve la gamine très convaincante du début à la fin.
Mèèèh revenons à nos moutons, quels problèmes? Ben d'abord des choix ont été fait qui sont assez ennuyeux, à plus forte raison quand ils remettent en cause la cohérence de l'histoire. Surement dans une volonté de faire qqch de consensuel, d'acceptable par le grand public et l'individu lambda, les geisha sont présentées de façon parfois trop idéalisée. En effet on insiste grandement sur une supposée part ingrate du métier du point de vue sentimental. Ainsi une geisha n'aurait pas le droit, pour perdurer, de se laisser aller à une vie amoureuse. Elle doit de fait accepter d'y renoncer pour se contenter, en échange d'un certain confort de vie, de se consacrer au divertissement de l'intelligencia de la ville.
Or, tout au long du film les geishas rencontrées, machiavéliques conservent l'image du prince, mais vivent des relations passionnées dans l'intimité de leurs appartements. On comprend très bien que l'abstinence de la vie sociale de geisha soit insupportable et entraine son lot de délassement secret, le repos de la guerrière en somme. Montrer ce double jeu, ce côté intouchable en surface et ce besoin, de l'affection qui lui est refusée sur le devant de la scène, en dedans pourrait être très habile. Seulement du début à la fin du film, une voix off transforme la "voie de la geisha puritaine" en un message subliminal digne d'un décret du PCUS, mais surtout avec tant d'emphase qu'on dirait une morale, une vérité absolue. C'est dommage, ça gâche énormément, c'était ce que je trouvais appréciable dans Slumdog Millionaire, des images, des faits, une histoire mais aucun édito, pas de commentaires ni de morale. Du coup c'est assez destabilisant de se voir affirmer la dureté du métier de geisha, la nécessité de la pudeur et de l'enfermermement au plus profond de soi des sentiments, quand le film montre (et souvent avec brio) d'assez magnifiques histoires d'amour. Une seule aurait pu paraitre anecdotique, mais devant la surenchère on se demande si vraiment il n'y a pas là une contradiction fondamentale.
De plus, le film encore une fois surement par facilité, insiste grandement sur ce qu'est qu'une geisha. Selon le scénariste une geisha est avant tout une artiste destinée au divertissement spirituel. A la grande différence d'une simple courtisane, son attribution s'arrête strictement avant les draps. Or, le film a l'honnêteté de présenter la coutume qui veut qu'une geisha n'en devienne une réellement de plein droit qu'après avoir vendu au plus généreux de ses admirateurs sa première nuit. Qui plus est ensuite elle peut, si elle réussit dans son métier de geisha, avoir l'opportunité d'obtenir un "protecteur". Le film, pudiquement, ne dévoile pas le niveau d'engagement de la geisha envers cet homme. On se doute cependant qu'il n'envoit pas simplement comme un papillon à une étoile, quelques mots d'amour (MB) en échange de son aile protectrice. Selon moi il y a donc une deuxième contradiction là. Certes une geisha a plus de cachet que la simple courtisane, bénéficier de ses faveurs est un indicible honneur pour lesquels des influences s'affrontent, parfois sans pitié. Cependant derrière cet amour courtois, très chevaleresque et réel, il ne faut pas gommer la vérité d'une geisha. En effet si elle est une artiste, elle vend quand même ses nuits, la différence réelle avec la courtisane ce n'est pas le corps, c'est que l'on vient vers elle non pas l'inverse. Le film je pense en voulant simplifier la nuance ou la rendre plus romantico-acceptable je ne sais pas tombe donc dans la non cohérence.
Enfin, je trouve que le film passe sous silence des détails assez atroces que l'histoire lui donnait la possibilité de dévoiler. Un ou deux qui me viennent à l'esprit, par exemple l'avenir de la soeur. Encore une fois de façon très pudique on maquille sa disparition de l'intrigue en une fuite de la ville réelle ou supposée. Pas un mot donc sur ce qu'il advient des filles achetées qui ne deviennent pas geisha, et qui tombent dans l'indignité du milieu de la prostitution. La femme qui fait le choix de séparer les soeurs ets une scène qui dure une demi seconde, elle est pourtant terrible. Elle sait pertinemment ou elle laisse aller la soeur ainée... De même comme l'héroïne devient geisha par amour, le film en profite pour passer sous silence l'alternative difficile de la plupart des filles du quartier. Devenir geisha ou sombrer. Mais d'autres aspects auraient au moins mérité une allusion, par exemple le risque de grossesse qui peut mettre un terme aux carrières si l'enfant n'est pas reconnu ou encore la maladie qui ne se soigne pas mais aussi certains cas de perte d'estime de soi (très brièvement montré avec le départ, la fuite de Gong Li) qui mène vers l'abandon, la dépression ou l'alcoolisme (une forte mortalité était par exemple constaté par la même parmi les courtisanes de Chine).
Mais bon il ne faut quand pas négliger de très nombreux aspects positifs. Ainsi, tout au long du film on peut profiter de scènes et d'ambiances magnifiques. Des jardins en fleurs tantôt avec un jeu entre deux couleurs comme le rose et le noir des ombres et des pétales. Ou alors au contraire avec le nombre et c'est ainsi que le réalisateur montre des rues animés avec des kimonos brodés de tout les tons. Mais dans l'intimité, le film est attachant aussi, en effet quand les femmes s'activent autour des geishas, on s'immerge totalement dans la scène, bercé par le frou frou des étoffes et les bavardages incessants. Là bien sur difficile de décrire les ambiances avec des mots, mais si vous lisez ça après avoir vu le film, je pense que vous serez d'accord, impossible de rester de marbre, c'est apaisant.
Enfin pour finir ce post, les personnages, en fait j'ai vu le film d'une traite tellement on se prend d'intérêt pour cette petite gamine jetée là par hasard. Elle est incontestablement mignonne et attachante on n'a pas envie de la laisser tomber et par la même le film^^. Là ou je trouve que c'est saisissant, c'est quand devenue une jeune femme elle choisit, d'aider après guerre "le président" à reconstruire sa fortune. Et donc face à la double nécessité de se défaire de Nobu et de s'attacher les faveurs du proconsulat elle accepte de, de, de, d'accorder ses faveurs à l'officier. Or j'ai assez bêtement trouvé le moment ou cet imbécile, ce rustre, cet homme des cavernes enfin tout ce que vous voudrez comme joyeusetés, pose ses pattes velues sur... elle, complètement révoltant. Totalement indigne, à la limite de dégoûtant. C'est fou comme rétrospectivement, je vois l'attachement on ne peut plus crétin et amusant de l'âne, moi-même, pour l'intégrité d'un personnage fictif. Si si, je vous assure cette gamine innocente qu'on retrouve étonnamment, dans la Zhang Ziyi adulte, c'est ... convaincant.^^
Bref un film bizare selon moi, j'attends donc de lire vos avis, ça n'est pas le film du millénaire pour les raisons que j'ai déjà dites au niveau du scénario. Le gars qui a fait ça, n'est pas le visionaire ou un quelconque rénovateur du cinéma. Cependant il rend un incontestable beau film et outre de somptueux décors, il faut reconnaître, que l'intrigue est porté par des actrices qui font que l'on admire plus l'écrin que le collier. Oui, l'âne sur ce seul argument dont je reconnais la totale subjectivité, a tendance surement à trop oublier les limites du scénario et à tout de même trouver que c'est un bon film. Malgré tout ce que j'en ai dit, je le conseille donc quand même vivement.
VOILA FIN DE LA RETROSPECTIVE HIHAN/NOSUKE (je t'engage gniark gniark, PART ONE Mémoire d'une geisha, sur les actrices terriblement sexy :love:)
BON FILM!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!